Le 22 mars 2018 des centaines de milliers d’agents publics (fonctionnaires et contractuels) ont défilé à Paris. Photographie : F. Blanc (CC BY-NC 2.0)

Les sept organisations de fonctionnaires dont l’interfédérale FO (UIAFP-FO) qui appelaient au 22 mars annoncent une nouvelle journée de grève et de manifestations le 22 mai. Elle sera suivie en juin d’un autre temps fort de mobilisation. Cette mobilisation se construit déjà. L’intersyndicale a décidé en effet le 10 avril d’organiser dès maintenant différentes actions (AG, meetings, pétition…) afin de sensibiliser le plus largement possible sur des revendications qui vont bien au-delà du cadre catégoriel. Il faut rassembler sur la nécessité de préserver la fonction publique indiquent solennellement les syndicats.

Trois semaines après la journée de grève massivement suivie le 22 mars, les relations entre le ministère de l’Action et des comptes publics et les syndicats de la fonction publique s’améliorent-elles ? Clairement la réponse est négative.

Le gouvernement reste sourd aux revendications des agents notamment à propos du pouvoir d’achat et maintient ses projets de réformes (rémunération au mérite, contractualisation des emplois, mesures de départs volontaires, restructuration des instances représentatives) contestés par les neuf syndicats de fonctionnaires.

Face à cet entêtement, les sept organisations à l’initiative du 22 mars lancent un nouvel appel à la grève et à des manifestations le 22 mai prochain. Elles annoncent aussi un temps fort de mobilisation en juin à l’occasion du rendez-vous salarial.

AG, meetings, rassemblements…

Ces organisations (dont l’UIAFP-FO) se réuniront le 3 mai. Elles laissent une nouvelle fois la porte ouverte aux deux autres syndicats (CFDT et Unsa) qui, sans prendre part aux actions ont toutefois exprimé le 4 avril –à l’instar de l’intersyndicale– leur rejet des axes de réformes prévus par le gouvernement.

Plus largement, l’intersyndicale a invité les agents publics à inscrire la mobilisation dans la continuité. Cela passe entre autres par la tenue dès à présent d’assemblées générales, de meetings, de rassemblements, de forums…

Les motifs de conflit entre les agents publics et le gouvernement sont multiples et cela bien au-delà d’une non prise en compte de revendications catégorielles indiquaient en substance les sept organisations le 10 avril à l’issue d’une intersyndicale. Ainsi, les personnels insistent sur le fait qu’ils ne partagent pas les objectifs poursuivis par le gouvernement consistant à réduire le périmètre de l’action publique avec la perspective d’abandon voire de privatisation de missions publiques.

Des mesures austères aux projets destructeurs

L’intersyndicale fait référence aux annonces attendues pour bientôt -et redoutées- émanant du Comité Action publique 2022 (CAP 2022). Ce comité qui à la demande du gouvernement est formé de personnalités qualifiées (y compris du secteur privé et des étrangers) et d’où sont absents les syndicats est censé présenter bientôt des mesures de réformes pour la fonction publique.

Or non seulement en lançant à l’automne ce programme de réflexion le gouvernement n’a pas écarté l’idée d’une possibilité de privatisation et abandon de mission mais il a tenu à souligner que le paramètre de la contrainte budgétaire doit présider à toute proposition de réforme.

Cela explique l’inquiétude des agents publics, eux qui depuis le printemps ont déjà subi de plein fouet des mesures austères lesquelles participent à dégrader davantage encore leur pouvoir d’achat. Le gouvernement a ainsi décidé de geler le point d’indice en 2018, soit la base de calcul de tous les traitements/salaires dans la fonction publique. Or les six années de gel des salaires entre 2010 et 2016 suivies d’une revalorisation salariale plus que timide (+1,2% d’augmentation générale mais en deux temps : +0,6% en juillet 2016 et +0,6% en février 2017) ont conduit à une aggravation de la perte de pouvoir d’achat. Cette perte est de l’ordre de 16% depuis 2000.

Nouvelle salve…

Depuis le printemps 2017, le gouvernement a aussi annoncé aux agents le rétablissement du jour de carence pour maladie, mesure qui impacte le pouvoir d’achat. Comme si cela ne suffisait pas le gouvernement n’a concédé –les syndicats, dont FO, ont dû batailler pour l’obtenir– qu’une compensation imparfaite de la hausse de la CSG. Compensation évacuant tout gain de pouvoir d’achat contrairement à ce qu’avait promis aux fonctionnaires l’actuel chef de l’État au cours de la campagne présidentielle.

Depuis le printemps encore le gouvernement a annoncé la suppression de 120 000 postes d’agents en cinq ans. Ces mesures qui vont à l’encontre des revendications des fonctionnaires lesquels demandent notamment une hausse générale des salaires n’ont pas constitué les seules attaques du gouvernement à l’encontre des agents. Une seconde salve a eu lieu le 1er février à l’issue du premier Comité interministériel de la transformation publique.

Le Premier ministre, M. Édouard Philippe a en effet annoncé des projets de réformes à destination de la fonction publique. Projets structurés en quatre volets : le développement de l’emploi contractuel mais aussi de la rémunération au mérite, l’élaboration de mesures pour des départs volontaires et la restructuration des instances représentatives du personnel (IRP) via des fusions (entre CHSCT et comités techniques).

Une orientation qui ne passe pas

Pour ces projets de réformes, le gouvernement a prévu d’ici l’automne prochain une longue série de séances de « concertation » avec les syndicats. Pour l’instant la concertation en question ne progresse guère. Et pour cause. L’ensemble des syndicats soit les neuf organisations de fonctionnaires (CFDT et Unsa compris) contestent ouvertement les dits projets. Face à cette adversité, le ministère de l’Action et des comptes publics a retoqué deux fois le document d’orientation intitulé refonder le contrat social avec les agents. Ce document doit servir de base de travail (agenda, méthode et programme) pendant la concertation.

Or s’indignent les organisations dont FO, le document n’a subi qu’un menu toilettage et à la marge. Dans cette troisième version du document, le contenu des projets est identique à ce qu’il était dans sa version initiale… Cela fait bondir les syndicats lesquels ont rappelé ce 10 avril à l’occasion d’une intersyndicale et au lendemain d’une séance de concertation consacrée au « dialogue social » (concrètement à la restructuration des IRP) qu’ils ne partagent ni l’orientation, ni la méthode ni le calendrier proposés par le gouvernement.

Les organisations demandent ainsi l’ouverture de discussions sur d’autres bases et sur un ensemble de thèmes afin de donner un avenir à la fonction publique. Contestant les projets de développement de l’emploi contractuel (alors que près d’un million de contractuels sont déjà présents dans la fonction publique) ainsi que le plan de suppression de 120 000 emplois statutaires, les sept organisations soulignent que le développement des missions de service public au service de l’intérêt général nécessite la création d’emplois statutaires dans les services qui en ont besoin et un nouveau plan de titularisation.

Des principes fondateurs à respecter

Pour l’intersyndicale, ce développement des emplois contractuels constitue une attaque contre le statut de même que la possible rémunération au mérite assise sur des critères antinomiques de ceux du service public. Si le gouvernement campe pour l’instant sur ses positions quant à ses quatre axes de réformes, il a cependant déjà reculé sur une piste de réforme évoquée le 16 octobre 2017 par le ministre de l’Action et des comptes publics, M. Darmanin. Le secrétaire d’État en charge de la fonction publique, M. Olivier Dussopt, a en effet indiqué début avril que le gouvernement avait abandonné l’idée d’une différenciation de la valeur du point d’indice selon les versants (État, territoriale, hospitalière) de la fonction publique.

La mobilisation des agents n’est pas étrangère à ce premier recul. Plus largement, les agents rappellent via l’intersyndicale qu’ils sont attachés à une fonction publique rendant des services de qualité à tous les usagers sur l’ensemble du territoire, aux valeurs et principes d’égalité, de solidarité et de justice sociale. En somme ils demandent que soient respectés les principes qui fondent la fonction publique républicaine structurée par son statut général.

Après la journée de grève du 22 mars, la mobilisation qui se construit actuellement et qui se traduira par une nouvelle grève le 22 mai puis une action en juin vise justement à défendre l’avenir de la fonction publique et ses principes fondateurs garants de l’intérêt général.

 

 

Tag(s) : #communiqué FO, #grève
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